c'est pas moi je l'jure!

si, maman, si

Quand je dis que j’habite au Canada, ici, on me répond systématiquement “ah, à Montréal?” et je réponds à chaque fois “non, du côté de Vancouver!” En proximité, c’est comme si j’habitais à Lausanne, en Suisse, et si quand je disais que je viens de Suisse, on me demandait “ah, près de Genève?” et que je répondais ” non, du côté de Budapest.”

Bref 🙂 Après un très long et relativement inconfortable voyage toujours coincée au milieu des rangées du milieu, je suis bien arrivée à Paris samedi matin. Je suis tout le temps fatiguée bien sûr, rien de nouveau, et mon estomac est toujours aussi noué et douloureux qu’il l’était déjà quelques jours avant mon départ. Samedi soir, j’ai passé une soirée avec ma frangine américaine et sa famille qui repartaient le lendemain déjà (après avoir visité leur nouvel appartement parisien), et j’ai réussi à manger un peu de cassoulet et de foi gras, et quelques cuillères de soupe à l’oignon.

Après une nuit pourrie parce que je dors n’importe quand, je suis allée rendre visite à ma mère, pour la toute première fois en France, et pour la toute première fois dans son nouvel EHPAD. D’abord, j’ai trouvé cet EHPAD très sympa, propre, et lumineux. Ensuite, j’ai trouvé ma mère plutôt pas trop mal. Elle m’a reconnue, on est sortie dans le petit jardin de la maison où les jonquilles devraient fleurir dans 2-3 jours, on a pu parler un peu des chèvres que mes parents avaient quand j’étais bébé et du fromage de chèvre qu’ils vendaient au marché, je lui ai lu plusieurs lettres et cartes envoyées par ses amis suisses, et puis on est allées manger dans leur petit salon. Bien sûr elle mange un peu n’importe comment et trop vite, et se lève 2-3 fois pour retourner dans sa chambre, mais quand je lui ai dit que je rêvais d’arriver un jour à trouver un repas aussi bon que ça au Canada, elle a gentiment offert de partager son chou à la crème. J’ai aussi dû l’engueuler un peu parce qu’elle se plaint souvent de tout d’une voix geignarde et ça m’énerve, et j’ai vite appris à ignorer ses vas et viens–quand on est dehors ou qu’on mange et qu’elle dit vouloir retourner dans sa chambre, je reste assise et je dis rien, et après avoir fait quelques pas seule, elle revient vers moi et se rassoit.

Je suis ensuite allée grignoter un bout de croque-monsieur avec la zia (qui s’occupe beaucoup de ma mère depuis son arrivée en France) et on a bien papoté– on est toutes les deux furax contre ma mère qui était dans un mauvais état mental depuis que mon père l’a quittée en 2011 et qui n’a jamais rien fait pour essayer d’aller mieux, avec le résultat qu’on connaît aujourd’hui. Et en plus d’être malheureuse, elle bouffe un temps et un argent et une énergie inimaginable à tous ceux et celles qui s’occupent d’elle!

Bon, demain je vais essayer de la convaincre d’aller à une activité de peinture parce que pour l’instant, elle refuse de faire quoi que ce soit avec les autres résidents de l’EHPAD. Ça sera plus tard dans la journée qu’aujourd’hui, donc ça ne va probablement pas être facile, et elle sera sûrement de plus mauvais poil, mais bon, je ne suis pas ici parce que tout est rose, hein.

8 comments

  1. valeriedehautesavoie

    Tu es mieux à Paris qu’ici dis donc. On a un temps assez pourri, même si hier il y a presqu’eu un rayon de soleil.
    J’espère que ce séjour ne sera pas trop épuisant. Je pense fort à toi, à tes soeurs et frangin. Je t’embrasse.

    Like

  2. En dehors de toute maladie psychologique, les personnes qui vieillissent voient leur caractère s’accentuer. Depuis que je suis un peu plus près de lui après mon déménagement, je me rends compte que mon père (85 ans) est plus têtu (voire buté), plus impatient, s’énerve plus quand il n’arrive pas à faire quelque chose qu’il faisait avant. Nous déployons des trésors de patience lorsque qu’il loge chez nous et parfois, je ruse aussi pour lui faire accepter un truc. Est-il dupe ? C’est pas simple en tous cas.
    Si ta mère te reconnait et que tu arrives à dialoguer avec elle, c’est déjà beaucoup. Courage !

    Like

    • @ Blanche, à partir de quel âge considères-tu ce phénomène (vieillissement/accentuation du caractère) ?? C’est un sujet d’importance, perso je constate que c’est à partir du mi-temps de la cinquantaine.

      Bleck

      Like

  3. Je ne suis pas sure que Le cassoulet et le foie gras soient les meilleurs alliés de l’estomac mais le principal est de se faire plaisir…😉 Quant à ta maman, tant mieux si son nouveau lieu de vie semble mieux. J’ai aussi passé du temps à en vouloir à ma mère de ce qu’elle devenait, je crois que c’est impossible de faire autrement, surtout qu’en temps que fille on doit se projeter un peu dans cet avenir là….maintenant avec l’age (Si,si…) je pense que j’aurais dû faire autrement….mais bon….
    Bon courage en tous cas, bises

    Like

  4. Ta soeur va venir vivre à paris? ça sera plus simple pour toi! 🙂
    j’imagine qu’il faut vraiment composer avec ses parents pour arriver à ses fins..ta mère semble à peu près en bonne santé en ce moment, profite un peu d’elle..
    tu as de la chance, il fait beau, mais le froid arrive d’ici 2 jours, un froid de moins 4°C, tu vas bien rire!!
    bonne journée à bientôt bises

    Like

  5. Wam

    Ça ne me paraît pas si pourri que ce à quoi je m’attendais, au final.
    On dirait que tu as du soleil, du ciel bleu, et de toute façon plus de douceur que dans le grand Nord Ouest canadien, du côté de Budapest. (J’ai tout compris , hein? Comment ça j’ai tout mélangé ????)
    Prends soin de TOI.

    Like

  6. minnederrien

    Je te lis depuis des années sans pour autant commenter…

    Depuis quelque temps, je suis surtout les soucis que tu peux avoir avec ta mère parce que mon père avait aussi une maladie dégénérative (il me semble avoir lu que tu avais parlé d’une forme d’Alzheimer pour ta maman, non?).

    Alors quand tu écris :

    « ma mère qui était dans un mauvais état mental depuis que mon père l’a quittée en 2011 et qui n’a jamais rien fait pour essayer d’aller mieux, avec le résultat qu’on connaît aujourd’hui. « 

    Le principe d’une maladie mentale, en général, c’est qu’on n’en est pas conscient. La patient est forcément dans le déni quand on lui en parle, il ne se rend pas compte que son cerveau fait des siennes. Parfois, en cas de troubles particuliers de sa mémoire, en cas d’échecs fréquents à accomplir ce qui ne posait aucun problème avant, il s’énerve, il se met en colère. Et c’est celui qui est présent qui dérouille. Cette agressivité n’est pas toujours dirigée contre le visiteur (aussi proche qu’il ait été avant) mais contre lui-même.

    Comment veux-tu que ta mère ait pris les choses en mains pour aller mieux ? Ça ne lui était pas possible.

    Tu vois, j’ai eu durant des années les pires relations du monde avec mon père, j’en ai souffert (je crois que j’en souffre toujours…) abominablement. Et puis quand il a commencé à sombrer (au début c’est à peine perceptible), devant sa détresse, j’ai décidé d’avoir une autre attitude avec lui

    Il ne faut pas remettre sans arrêt ces gens en face de leur réalité, ça ne sert à rien. Il ne faut pas les contraindre en permanence parce qu’ils ne comprennent rien à ce que nous souhaitons, ils ne sont plus du tout là dedans, ils sont dans un no man’s land terrifiant où ils ont déjà bien du mal à se retrouver eux-mêmes, alors si en plus il leur faut rejoindre les codes établis des autres, ils ne peuvent absolument pas s’en sortir et ils souffrent encore plus.

    Parce que la maladie mentale ou la maladie dégénérative, fait souffrir celui qui en est atteint, il ne sait pas le formuler, mais il est broyé.

    Quand je n’ai plus contrarié mon père, quand j’ai accepté ses discours incohérents, ses échappées diverses, nous avons pu échanger autrement, il n’était plus dans l’agressivité. Et au bout du compte, alors que j’étais la mal aimée, je suis enfin devenue son enfant,la seule.

    Pendant sa maladie , j’ai appris qu’il y avait mille manières de communiquer qui ne passent pas toutes par la parole, par exemple il y a le regard ou le toucher.

    Ce genre de maladie est effrayante parce qu’elle nous renvoie à nous-mêmes, à ce que nous pourrions devenir, elle est effrayante parce que nous ne retrouvons plus nos parents tels qu’en eux-mêmes dans leurs meilleures périodes.

    Manifestement, tu n’as pas eu toi non plus, des relations épanouies (épanouissantes…) avec ta mère. Mais avant de la perdre, il faut te faut peut-être trouver ce chemin qui va te mener vers elle autrement, simplement pour l’apaisement et la sérénité ultérieurs.

    Courage…

    Like

Merci pour vos commentaires que j'adore :)